mardi 3 avril 2018

On n’est jamais mort en politique.

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Salutations les aminches.

En politique, c'est comme partout ailleurs, certains adieux sont déchirants.

C'est vrai quoi. La sonnerie au mort, un matin brumeux, regardant le corbillard se dandiner, suivi par presque personne, seules les grenouilles de noir vêtues, qui n'ont rien de mieux à faire : le PS est mort...

C'est triste.

Ah si c'est triste.

Bon...

Faisons comme si, pour la beauté de la démonstration.



Ca va un brin spoiler les filles.

...

...

Vous voilà prévenues.

...

...

Philippe Rickwaert, éminence grise du PS, la boite à outil de Solférino, le Baron  Noir de la gôche "responsable", est en taule. Rattrapé par ses magouilles, qu'il a avalé pour l'ancien président Laugier, président poussé à la démission par sa protégée Amélie Dorendeu. Amélie qui est aux portes du pouvoir, face au FN au second tour de la présidentielle, bientôt à l'Elysée mais mal élue face au Front National. 

Rickwaert, libéré plus tôt, avec bracelet électronique, retrouve son rôle d'homme de l'ombre, conseiller occulte de la présidente, il veut faire l'union de la gauche, PS et gôche gauche ensemble, tous ensemble, tous ensemble... 


Mais Amélie Dorendeu ne l'entend pas ainsi. Elle veut la tectonique des plaques, tout envoyer bouler, enterrer l'ancien monde...


HOUSE OF CARDS ? Hantée par les frasques de son acteur principal, déjà desservie par une intrigue sinueuse perdue dans le nanawesque foireux. SCANDAL ? Ne déconnons pas non plus...


Oublions tout cela, LA série politique est française, et Canal frappe un grand coup pour le coup sur ce coup.

Après une première saison de haute volée, BARON NOIR était attendue au tournant et devait surmonter la difficulté inhérente à la fiction politique sérielle : l'actualité est toujours en avance.


Écrite et réalisée avant l'arrivée de Macron, BARON NOIR pouvait faire craindre le décalage, la cible manquée, la fléchette qui rate le cercle magique, franchit la fenêtre ouverte et finit sa course dans le caniveau.

BARON NOIR s'en sort bien, bien mieux que HOC qui n'avait pas anticipé le Trumpisme triomphant (qui l'avait fait ?). Car,  même si c'est une femme qui est au Château, même si elle est encartée PS, ce que BN a a capté c'est l'esprit, l'hubris de l'époque, la fin d'un monde : la politique  à l'ancienne, c'est fini.

Dans les mots en tout cas... 



Amélie Dorendeu, à qui Anna Mouglalis prête sa voix rauque, sa silhouette longiligne et son jeu millimétré, veut gouverner au centre et cherche une alliance avec Stephane Thorigny (Pascal Elbé, racé et affûté).


Gouverner au centre... A droite, donc.

Cela Philippe Rickwaert l'a bien compris. Kad Merad, démarche pesante et énergie vibrionnante, est surprenant, encore plus à l'aise que dans la première saison. Il est très convaincant dans le rôle de cet esprit agile, d'une grande plasticité intellectuelle. Il élève son personnage de magouilleur électoral peu ragoutant à quelque chose d'autre. On n'arrive pas à le mépriser totalement ce Philippe Rickwaert, mélange curieux d'opportunisme nauséeux et de convictions inébranlables.

BARON NOIRE est une série subtile en cela qu'elle ne célèbre pas un tous pourris incantatoire et racoleur mais ne tombe pas non plus dans un angélisme forcé : on est dans la politique manœuvrière où un homme repris de justice mais avec un aplomb phénoménal et 15 idées à la seconde va essayer de tordre le bras à la Présidente.

Il pourra compter sur Jean Luc Mélenchon pardon sur Michel Vidal. Savoureux François Morel, tout simplement génial en Robespierre du suffrage universel, aimant un peu trop le son de sa voix pour son bien. Intellectuel raffiné, tribun confirmé, il est à la gauche du PS et entamera un pas de deux avec la présidente qui hésite avant son recentrage.

BARON NOIR est l'histoire d'un échec. Rickwaert va constamment échouer dans ses entreprises, lui qui ne se résout pas à l'effacement des deux blocs, à l'émergence d'une troisième voie qu'il suppute bien bien merdeuse.

BARON NOIR embrasse toute une flopée de thèmes sulfureux : laïcité, communautarisme, montée du FN, terrorisme etc. n'évite pas toujours un certain didactisme, quelquefois, rarement de fait.

Mais elle ne perd jamais de vue son fil rouge et nous emmène exactement là où elle avait prévu de le faire sans que l'on ne devine jamais la ligne d'arrivée.



Franchement, une série qui nous scotche à la politique après une année électorale foireuse...

C'est fort...

Très fort.

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