vendredi 26 juin 2015


Salutations les filles. 

En mes jeunes années, acné et cheveux gras. Rébellion en caoutchouc. Lunettes de soudeurs et appareil dentaires dignes d'un Tupolev. Jeans déchirés et pulls informes. 

Le sex symbol inversé. Ou bien sur Alpha du Centaure peut-être, une civilisation aux mœurs étranges. 

Brefle...

En ce passé heureusement révolu...

[j'en vois qui ricanent !]

... J'ai vu un film qui m'avait émerveillé. 


Bon...

Le sens critique n'était pas celui que j'avais de plus développé. 

Entre le jeu tout aussi décalé que le regard de l'acteur principal, les rochers en carton et une action aussi trépidante qu'un convoi funéraire ; la seconde vision, des années plus tard, fut rude.

On devrait parfois en rester à ces impressions de jeunesse et ne pas tenter le diablotin.

Mais parfois non.


Petit comptable à la vie sans intérêt, Siméon Nevzorof s'est fait prédire l'avenir par une bohémienne qui lui a indiqué que quand le monde sombrerait dans la guerre, il deviendrait immensément riche. 

Dès lors, il n'attend plus que la violence qui arrive avec la Révolution russe et lui donnera en effet pouvoir et fortune. 

Mais le destin est facétieux et rapidement, Siméon chute, et découvre alors que son don le plus marqué est sa capacité à renaître sans cesse de ses cendres.


Passionné par l'œuvre de Léon Tolstoï, Pascal Rabaté a acheté par erreur le livre original (d'Alexis Tolstoï, un Stalinien pur jus) aux puces. 

Découvrant son erreur il le met de côté, sans y consacrer plus d'intérêt. Plusieurs mois après, alors qu'il n'a plus rien à lire, il se décide à ouvrir IBICUS. 

Il est tellement emporté par le livre qu'il décide de s'attaquer à une longue adaptation – plus de 500 pages – en bande dessinée de ce roman méconnu.

Et bien lui en a pris.

J'ai lu cette BD en mes années estudiantines et je l'ai relu dernièrement. Et je reste sur ma première impression.

Cette BD est un chef d'oeuvre. 

Rabaté a expurgé tous les effets de manches idéologiques du Tolstoï éponyme et Stalinien pour nous donner un opus magistral.

Entre la parabole morale cynique et le récit d'aventure. L'ont suit les pérégrinations d'un homme médiocre, lâche et veule mais qui, au gré de circonstances exceptionnelles, porté par une ruse matoise et une absence confondante de scrupules va se forger un destin et une fortune. 

Mille fois recommencé.

Mille fois perdue et renflouée.

Nous ne sommes pas là dans une oeuvre consensuelle. Déjà le trait de crayon, minimaliste et ondoyant, en fera fuir plus d'un(e).


Tout en ombres et en silhouettes élancées, le fusain d'un noir et blanc somptueux retrace admirablement la trajectoire bouffonne et tragique de Simon. 

Les derniers coups de butoir d'une armée de Russes blancs, les manœuvres crapoteuses des espions de tous poils, d'escrocs voyant là la promesses d'aubaines commerciales, d'idéologues du Parti et de candidats à l'exil et à une vie sauve... On feuillette l'Histoire la grande celle qui broie et concasse.

Et un dénouement jubilatoire les aminches.

De la grande ouvrage. 

Enfoncé le Highglandeur ! Vive le Rabaté rabatteur !

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