mercredi 20 mai 2015

... Le dieu de la guerre !


Bonjour les filles.

Imaginez les filles, z'êtes là peinardes. Enfin. Z'avez quand même une vie brisée. Pas parce qu'on vous a piqué le dernier flan à la vanille à la cantoche. Nan. La vie foutue dans les grandes diagonales. Un tombereau de merde, une tempête de bouses, une tornade de traumas et de perte irrémédiable de tout ce qui vous rendaient dignes.

Et songez (ce ne devrait pas être trop ardu, l'humanité est ainsi faite) que vous pouviez blâmer quelqu'un en particulier, une personne précise pour votre présente tragédie...

C'est à ce moment là que surgit l'Agent Graves.

Une mallette au poignet. Et dans cette dernière les preuves irréfutables de l'implication de cette personne dans votre chute dans les sept cercles de votre damnation personnelle. 

Ainsi qu'une arme à feu non répertoriée, absente de tous les fichiers existants. Et 100 balles semblablement intraçables.

Ce n'est pas tout. Vous avez l'assurance de l'agent Graves que vous bénéficierez d'une totale impunité si vous vous servez de cette arme.

Et bizarrement vous le croyez l'agent Graves. L'Agent Graves ne ment jamais. Il ne dit pas toute la vérité. Il lâche des parties mais garde l'ensemble pour lui...

C'est sur ce dilemme moral que repose l'intrigue de ce phénoménal (le mot n'est pas trop fort) comics qu'est 100 BULLETS.

Mais pas que...

L'on se rend vite compte que Graves poursuit une quête plus personnelle, de vengeance ? De pouvoir ? Et qu'il a un plan d'envergure en tête en multipliant ces foutues mallettes comme d'autres les tweets indigents.

Graves travaillait auparavant pour le Trust.


Vaste et ancienne organisation criminelle, cartel mafieux de 13 familles qui se sont partagé l'Amérique du Nord. Pour réguler les conflits inévitables dans cette fosse d'alligators gloutons, une force de police interne est mise en place : les Minute men. Graves en était le chef...

Voilou les aminches le synopsis résumé, si si résumé j'insiste, de 100 BULLETS.

Bon...

Que dire ? Comment refléter la richesse et la profondeur de 100 BULLETS ? 

Incroyable galerie de personnages, déjà. Chaque opus (18 au compteur) ou presque introduit un nouvel arrivant qui se fond (ou pas) dans la trame de fond. Au début, l'Agent Graves distribue ces mallettes à des inconnus (que l'on suppose inconnus). Libre à ces derniers d'utiliser ou non son contenu. Graves donne juste un choix. Biaisé peut être mais il ne force jamais la gâchette et il ne reprend jamais sa mallette.

Et puis peu à peu, l'histoire du TRUST se déploie et la fresque prends toute son ampleur majestueuse. Et on s'inquiète. Enfin moi en tout cas. Le dénouement sera-t-il à la hauteur ?

Un autre aspect de 100 BULLETS est que le diable se niche dans les détails. Une planche, un arrière plan peut revêtir une importance fondamentale dans un tome prochain. 

Grâce à mon dealer es comics, j'ai eu la chance de lire d'affilée les 18 volumes. Ce qui est un avantage certain. Mais l'on voit les auteurs, enfin l'Auteur, Brian Azzarello accumuler les fausses pistes, les rebondissements, et l'on craint un final Lostien, bringuebalant et capillotracté...

J'y reviendrai.

Soulignons ici le trait de pinceaux, admirablement complémentaire du propos. C'est sombre 100 BULLETS et sans pitié et violent, tout en ayant un humour à froid, parfois frôlant le burlesque. Le dessinateur Edouardo Risso privilégie les teintes obscures avec un jeu sur les ombres et les couleurs, découpant nerveusement les planches en courtes cases tranchantes.


C'est du très très très beau travail ! De haute volée !

Mais surtout 100 BULLETS c'est un script. Démoniaque. Des dialogues de gros durs désenchantés, de garces calculatrices, de sales types, d'hommes bons égarés, de femmes justes, belles et fortes (ah Dizzy...)... Toutes les figures imposées du roman noir sont instillées et diffusées à haute dose.

Puis l'oeuvre vire à la paranoïa conspirationniste. Les alliances se nouent et se défont. Les plan d'ensembles se lient à des stratégies au long cours. Les jeux sont doubles, triples et l'on s'y perd.

Et finalement.... Tout doit se dénouer dans le dernier opus. C'est un peu tard... L'on se retrouve à relire encore et encore ce dernier tome en essayant de faire coïncider les pièce du puzzle, à coups de marteaux et de meuleuse. Ma lecture achevée, je n'ai pu m'empêcher de ressentir une certaine frustration. 

" 'Tin de bordelum de merdum de bite à queue !"

Une fois la digestion accomplie, laissant le temps faire son taf, ma frustration s'est envolée pour faire place à un sourire amusé. C'est qu'ils sont un peu ridicules en fait ces hommes en noirs avec leurs costumes trois pièces et leur Grand Jeu. Ces brutes testostéronées à fleur de poil. Ces tacticiens vains qui brandissent leurs gros calibres et leurs sentences définitives. Azzarello nous les croquent dans leur vérité nue un brin grotesque. 

En tous cas, c'est ma lecture.

100 BULLETS se prêtent à toutes sortes exégèses. Preuve indéniable que nous sommes face à une oeuvre majeure. 

Impressionnant !

Pour conclure, il serait temps que Tarantino se penche sur ces bulles enchantées et fasse le job. Je lui balance quelques pistes, gracieusement : 


Après tout on peut rêver : 


Même si je pense que le format télévisuel serait bien plus adapté à 100 BULLETS pour en garder tout le substantifique moelleux !

"Votre bloguerie ?
- Oui Clafoutine ?
- Un vieux Monsieur m'a donné une mallette. Il y a une arme dedans et un dossier avec votre photo.
- Ouh là ! Fuck !"

4 commentaires :

  1. Salut Namimac...
    Bon, alors, déjà, j'suis content qu'on soit Brothers-in-Arms à 100 balles. J'pensais que ça te plairait, mais bon, y'a toujours un risque à faire partager un truc qui tient à cœur, celui justement que le partage ne soit pas au rendez-vous. Mais là, visiblement, on est sur la même longueur d'ondes.
    J'reviendrais pas sur ton analyse, je la partage. Les personnages de cette oeuvre littéraire resteront parmi mes références. Pas forcément Graves, d'ailleurs, ni même Augustus... Dizzi, Lono, Cole évidemment, mais la majorité des "seconds rôles" sont magnifiques, avec une spéciale dédicace au journaleux désabusé (Branch, je crois...) et au saxophoniste pas gâté par la nature.

    La fin, ouais, c'est un "Tout ça pour ça...", avec des trous dans la voilure des doubles ou triples jeux.
    Mais un tout ça pour ça qui a du sens, un truc qui fait un pshittt qui me semble cohérent avec la violence déchainée pour en arriver jusque là, parce qu'après tout, Graves et consorts ne sont que des humains, avec leurs limites, et c'est déjà un miracle que la situation se soit décantée jusque là. Et aussi machiavéliques qu'ils soient, y'a que dans l'Agence Tous Risques qu'un plan se déroule sans accroc, surtout quand tout le monde se connait, a un flingue dans la main et des envies de tuer.

    Voilà...
    On passe à quoi, maintenant ;) ?

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    1. Oui branch. De vitto serait parfait. C'est fou le casting que l'on imagine pour 100 Bullets... Et le saxophoniste et son destin parfaitement horrible... Quant à la suite mon bon naminoyme, ma confiance t'est toute accordée... Héhé;;;

      J’entame Universal War One (http://uw1.bajram.com/) présentement, te tiendrais au jus mais j'aime beaucoup et Barjam l'auteur et le space opéra, ses majestueux vaisseaux fendant le vide intersidéral...

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  2. Si tu connais pas Fables, je peux te filer les 1ers arcs. Excellente BD qui met en scène les "Fables", personnages des contes bien connus -Blanche Neige, le Grand Mechant Loup, Cendrillon,...- ou moins connus, plus folkoriques, en guerre contre un Ennemi mystérieux qui les a repoussé de leurs Royaumes et qui se sont réfugiés chez nous, les "Communs".
    Le pitch paie pas de mine, mais c'est vraiment très bon.
    Dans les classiques, y'a Maus aussi, faut le lire une fois dans sa vie.
    Je pense que tu connais Spider Jerusalem, mais au cas où... Et DMZ, forcément.
    From Hell, la "véritable histoire de Jack l'éventreur", qui a inspiré le film avec Johnny Depp.
    Ou encore quelques bons arcs de Constantine ou de DD.
    Voilà ce qui me vient spontanément pour les comics, mais faudrait en causer.

    Après, en "cartonné franco-belge", je peux aussi avoir quelques pépites à proposer.
    Déjà... Dis-moi si tu as lu "De Cape et de Crocs", et on verra pour le reste...

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    1. Fables oui j'en ai entendu parler. Pourquoi pas ? Maus j'ai lu (il y a déjà fort fort lointain mais j'en garde un souvenir vif). From Hell itou, une somme, mais c'est mon côté fan de serial killeurse, et là on touche au mythe. En plus Alan Moore.. DMZ l'ami Pacalino m'a filé les bouquins (excellents du reste) me manque juste la fin... Et de cape et de Crocs, j'ai lu le premier cycle il me semble mais je n'en suis plus si sûr. Si tu avais LA LIGUE DES GENTLEMENS EXTRAORDINAIRES, je serai preneur, je n'ai lu que le premier tome.

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