jeudi 13 février 2014

"L'homme africain n'est pas assez entré dans l'histoire" comme disait l'autre. Ce qui est sûr c'est que l'histoire en revanche lui est méchamment rentrée dans la tronche à l'homme africain. Singulièrement au Congo.



Ce livre est l'histoire, fidèle, rigoureuse, éminemment documentée et absolument romanesque d'un pays. L'histoire d'un peuple, d'une nation, d'un fleuve sur lequel s'aventurèrent Stanley et les premiers marchands d'esclaves, les envoyés du roi des Belges, et ceux venus tracer les lignes frontalières de cette immensité géographique appelée Congo. 

David Van Reybrouck retrace le destin tumultueux de ce pays, de la préhistoire à nos jours. De la colonisation à l'indépendance, il entremêle les faits historiques et le récit de ses rencontres.



David Van reybrouck y est allé au Congo. Plusieurs fois et longuement. Si l'espérance de vie au Congo est honteusement courte, il a rencontré de nombreux aïeux vifs et malicieux. Le premier Congolais qu'il nous présente nous fait irrésistiblement songer au début de LITTLE BIG MAN : 


Il y de cela 120 ans quand j'avais 10 ans...
Mais tous les événements racontés avec maestria dans ce grand livre touffu et documenté ne sont pas délicieux et charmants.

L'histoire du Congo donc. La préhistoire et toute la période pré-coloniale sont survolées en quelques pages superbes et nous nous rendons compte que l'horreur est chose bien répartie sur notre boule bleue. L'esclavage n'est pas une invention occidentale. Mais son optimisation hypocrite si.



Je suppose que Christian Vanneste, député qui a tenté de faire passer un amendement sur les aspects positifs de la colonisation a dû lire TINTIN AU CONGO. Plusieurs fois. 
Je doute en revanche qu'il ait lu (ou qu'il le lise un jour) CONGO de David Van Reybrouck.

Tintin n'est jamais allé au Congo. Hergé non plus. Il se contente de reproduire la pathétique propagande raciste de l'état Belge maquillant le pillage d'un pays continent en une oeuvre civilisatrice.


Mais avant que l'état belge ne récupère le Congo, ce dernier était la propriété personnelle du roi des Belges. Son petit chez lui en somme. Et là... Les mots font défaut... Enfin les miens parce que ceux de David Van Reybrouck sont évocateurs et saisissent admirablement l'essence de ce pays complexe. 

La suite de l'ouvrage prévient toute tentation de diaboliser le diable blanc et tout lui mettre sur la chicote. Si les racines du mal ont bien été plantées à cette époque, l'abjection ne distingue pas les couleurs. 

De l'Indépendance impréparée et désastreuse au Mobustisme meurtrier suivies de guerres "libératrices" incessantes, David Van Reybrouck nous trace la trajectoire d'un pays qu'il aime et fait aimer. Plus exactement on aimerait aimer le Congo malgré le Congo. Malgré ses tueries, ses machettes (les balles coûtent plus chères qu'une lame bien aiguisée). On plaint surtout les Congolais, plus particulièrement les congolaises En première ligne...

Enfin la vision du Congo contemporain, ultralibéral, ancré au creux douillet de la mondialisation, nous laisse un goût amer.

On en revient à l'autre là et son homme africain au seuil de l'histoire. De un pour ce que l'histoire et la civilisation lui ont apportés... De deux, rien de plus faux ! Le Congo s'est toujours trouvé au carrefour de l'histoire pour son plus grand malheur le plus souvent. 


En fait le Congo est même en avance sur l'histoire elle même. Comme l'écrit si bien David : 

"La violence ethnique[...] ne relevait pas de l'atavisme d'un réflexe primitif , mais des conséquences d'un manque de terres dans une économie de guerre au service de la mondialisation. Elle est annonciatrice, en ce sens, de ce qui attend une planète surpeuplée. Le Congo n'est pas en retard sur l'Histoire mais en avance."

Et bien ça promet...

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